L’esclavage dans les plantations de cacao

Peut-être avez-vous déjà entendu parler du problème de l’esclavage d’enfants dans certaines plantations de cacao. Beaucoup d’articles et de documentaires, dont l’excellent Dark Side of Chocolate de Miki Mistrati, ont paru au cours des dernières années sur le sujet. La situation est particulièrement grave en Afrique de l’Ouest, selon l’International Institute of Tropical Agriculture (IITA), notamment en Côte d’Ivoire et au Ghana. Ce qu’il est important de savoir est que ces deux pays comptent à eux seuls pour presque les deux tiers de la production mondiale de cacao. C’est surtout là que s’approvisionnent les multinationales du chocolat.

Selon l’IITA, environ 1,8 millions d’enfants de moins de 14 ans travaillaient dans des plantations de cacao il y a une dizaine d’année, et la situation n’est pas plus rose aujourd’hui. Ce sont parfois les enfants des producteurs eux-mêmes. Mais dans d’autres cas il s’agit d’enfants achetés dans les pays voisins (notamment le Burkina Faso) à des familles pauvres. En plus de ne pas recevoir d’éducation, ces jeunes effectuent des tâches dangereuses pour eux, comme étendre des pesticides ou manipuler des machettes.

(Source des photos: BBC News )

Le problème de l’esclavage dans le monde du cacao n’est pas récent. Déjà en 1900, Cadbury et quelques autres grandes compagnies de l’époque (Fry , Rowntree), y ont été confronté. Au début du 20e siècle, c’est sur la minuscule île de Sao Tomé (dans le Golf de Guinée), alors sous domination portugaise, que des esclaves achetés en Angola étaient “engagés” pour travailler dans des plantations. La nouvelle a eu l’effet d’une bombe à l’époque puisque l’esclavage avait été aboli dans cette île en 1875. Cadbury, qui achetait 45% de toutes ses fèves de cacao sur cette île, et ses confrères britanniques ont eu beaucoup de difficultés à se sortir de ce scandale (1)…

Sao_Tome

(Source: Wikimedia Commons )

Beaucoup plus récemment, en 2001, le Protocole Harkin-Engel (2) a été signé dans le but de mettre fin à l’esclavage et au trafic d’enfants en Côte d’Ivoire et au Ghana. Parmi les signataires, des personnalités politiques (le sénateur américain Tom Harkin et le représentant de la United States House, Eliot Engel) et les PDG de huit multinationales du chocolat (entre autres Hershey, Mars, Nestlé, Blommer et Guittard). Un de leurs objectifs était de créer une certification afin que les consommateurs soient certains de manger du chocolat pour lequel aucun enfant n’a travaillé. Un pas dans la bonne direction, mais plus de dix ans après, très peu a changé dans les faits, indiquent les rapports à ce sujet…

Une solution pour enrayer le problème est le commerce direct, qui me tient tant à coeur et dont j’ai déjà parlé dans un autre article . Les chocolatiers qui se rendent eux-mêmes dans les plantations afin d’acheter leurs fèves de cacao sont en mesure de voir comment se passe réellement le travail sur place et ainsi d’éviter les abus. En plus de s’assurer une meilleure qualité de fèves tout en payant mieux les producteurs de cacao.

La situation des enfants dans les plantations de cacao continuera sûrement de faire parler au moins jusqu’en 2020, date à laquelle les multinationales du chocolat ont promis d’avoir réussi à éradiquer le problème. À suivre!

(1) Pour plus d’informations sur ce chapitre de l’histoire du chocolat, lire le très intéressant Chocolate Wars , de Deborah Cadbury.

(2) Le texte intégral du protocole est disponible à cette adresse: http://www.cocoainitiative.org/images/stories/pdf/harkin engel protocol.pdf

SOURCES:
Coe, S. D. et Coe, M. D. 2010. The True History of Chocolate . 2e édition. Londres: Thames & Hudson.

Chocolate Makers opt for ethical and sustainable cacao: http://www.confectionerynews.com/Markets/Confectionery-in-2012-Sustainability-innovation-and-highlights/(page)/1

Hawksley, H. 29 juin 2012. Nestle “failing” on child labour abuse, says FLA report, BBC News, http://www.bbc.co.uk/news/world-africa-18644870

IITA, juillet 2002. Summary of Findings from the Child Labor Surveys In the Cocoa Sector of West Africa: Cameroon, Côte d’Ivoire, Ghana, and Nigeria, http://www.dol.gov/ilab/media/reports/iclp/cocoafindings.pdf

Leave a Reply

Connect with:

Your email address will not be published. Required fields are marked *

You may use these HTML tags and attributes: <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>